Le cannabis en Uruguay – lois, attitudes locales et historie

The Uruguay flag and a cannabis leaf against the sunshine

L’Uruguay a été le premier pays au monde à légaliser le cannabis à titre récréatif et médical et à autoriser les pharmaciens à délivrer une dose hebdomadaire maximale de 10 grammes aux plus de 18 ans. Cette décision de proposer du cannabis a priori meilleur et moins cher a été stimulée par la volonté d’endiguer le commerce illicite de cette drogue.

    • Capitale
    • Montevideo
    • Habitants
    • 3,549,000
    • Produits CBD
    • Légal
    • Cannabis récréatif
    • Légal
    • Cannabis médicinal
    • Légal since 2013

Les lois uruguayennes sur le cannabis

Peut-on posséder et consommer du cannabis en Uruguay ?

La consommation et la possession de cannabis sont légales en Uruguay ; ce pays a en effet été le premier pays au monde à légaliser, en 2013, la consommation de cannabis récréatif.

L’Uruguay n’a jamais considéré la consommation individuelle de drogue comme un délit. Une loi abrogée en 1974 a permis aux juges de déterminer si une personne détenait de la drogue à des fins personnelles ou commerciales.

En 2012, le président Mujica est allé encore plus loin en présentant le Projet de loi 19.172 visant à totalement légaliser le cannabis. Ce projet était destiné à lutter contre le crime organisé et les problèmes de sociaux y étant associés.

La loi autorise désormais les citoyens à se procurer un maximum de 10 grammes de cannabis par semaine, une mesure qui permet aux détaillants de ne pas subir de pression de la part d’acheteurs voulant, par exemple, se procurer en une seule fois la quantité mensuelle légale

À l’origine, la loi garantissait également un prix au gramme d’un dollar. Le prix exact a depuis fluctué (il a essentiellement diminué plutôt qu’augmenté), mais permet toujours au gouvernement d’être plus compétitif que la concurrence illicite.

Pour acheter légalement du cannabis, certaines règles et restrictions sont appliquées, notamment :

  • Les acheteurs doivent être enregistrés
  • Le cannabis doit être vendu dans une boîte sur laquelle les risques sanitaires potentiels sont explicitement mentionnés (comme sur les emballages réservés au tabac)
  • La consommation de cannabis n’est pas autorisée dans les lieux publics
  • Les consommateurs ne sont pas autorisés à prendre le volant si leurs réflexes sont affectés.
Une rouleau à pâtisserie, une cuillère en bois, des biscuits et un pot de boutons de cannabis

Peut-on vendre du cannabis en Uruguay ?

Un projet de loi a été adopté en 2013 afin de légaliser et réglementer la vente de cannabis.

Julio Calzada, le secrétaire général du Conseil national sur les drogues, a souligné que le gouvernement serait responsable de la réglementation de la production de cannabis. Il a aussi ajouté : « Les entreprises peuvent obtenir un permis pour cultiver le cannabis si elles répondent à tous les critères établis. Cependant, il ne s’agit pas d’un marché libre. Le gouvernement contrôlera l’intégralité de la production et fixera le prix, la qualité et le volume de production maximal. »

Il a indiqué que les individus de plus de 18 ans seront autorisés à acheter jusqu’à 40 grammes de cannabis par mois. Les personnes étrangères n’auront pas le droit d’en acheter (une manière d’étouffer dans l’œuf le « tourisme du cannabis »), et le transport du cannabis au-delà des frontières internationales sera toujours considéré comme une infraction pénale.

Les détaillants sont tenus de vendre le cannabis dans des boîtes indiquant explicitement les risques sanitaires potentiels (comme sur les emballages réservés au tabac). Le cannabis ne doit par ailleurs pas être exposé à la vue du grand public ni présenter une teneur en THC supérieure à 15 %.

La réalité sur la vente de cannabis

Bien que la loi ait été adoptée en 2013, il aura fallu plus de trois ans et demi avant que les premiers détaillants puissent vendre du cannabis aux consommateurs.

Ce retard s’explique par la réticence des pharmaciens à en assurer la vente. L’Association des pharmaciens d’Uruguay (AQFU) s’est fortement opposée à la vente de cannabis à usage non thérapeutique, étant également très préoccupée par la concurrence illicite. Le propriétaire d’une pharmacie, Marcello Trujillo, a ainsi déclaré lors d’une interview avec The Cannabist : « Je ne vois pas la nécessité d’entrer en conflit avec des gens qui vendent déjà de l’herbe dans le quartier, et d’ajouter, je n’ai simplement pas envie de me mettre ou de mettre mes employés dans une situation délicate ».

En dépit de ces obstacles, le cannabis a finalement été commercialisé en 2017.

Esteban Riviera, pharmacien à Montevideo, s’est exprimé en ces termes à la BBC : « Nous avons vendu beaucoup de cannabis le premier jour ; l’équivalent de 1 250 boîtes en six heures. La queue pour acheter de la marijuana faisait deux pâtés de maisons. »

Cependant, Riviera, tout comme d’autres pharmaciens en Uruguay, a rencontré des difficultés. Sa banque lui a en effet signifié qu’il devait arrêter de vendre du cannabis s’il souhaitait maintenir son compte bancaire. Ne pouvant prendre ce risque financier, Riviera a donc arrêté la vente de cannabis.

Cette situation s’explique par le fait qu’un grand nombre de prêteurs uruguayens sont associés à des banques américaines. Or, la législation des États-Unis en matière de financement de substances réglementées est très restrictive, ces derniers ne voulant pas être liés à « l’argent de la marihuana ».

Force est de constater qu’il s’agit là de véritables difficultés – mais même si ce sont les détaillants qui en font les frais, le nombre de points de vente proposant du cannabis ne cesse de croître.

Peut-on cultiver du cannabis en Uruguay ?

En 2013, le président Mujica a fait passer un projet de loi autorisant chaque personne à faire pousser jusqu’à six plants de cannabis à des fins non commerciales et pour une quantité totale annuelle inférieure à 480 grammes. 

Les clubs de fumeurs de cannabis enregistrés ont par ailleurs été légalisés et autorisés à cultiver 99 plants par an. Ces clubs doivent être formés de 15 à 45 membres, chacun d’eux pouvant acheter jusqu’à 480 grammes de cannabis par an.

La loi a également autorisé les plus gros producteurs à cultiver du cannabis sous condition d’obtenir une licence officielle. Pour justifier sa décision, le président a expliqué que le pays souhaitait « apporter sa contribution à l’humanité » en légalisant la culture de cette drogue mais qu’il évaluerait à nouveau la situation si « l’expérience » ne donnait pas le résultat attendu.

Le CBD est-il légal en Uruguay ?

La consommation, l’achat et la vente de CBD sont légaux en Uruguay. Néanmoins, il est étonnamment difficile de s’en procurer.

Par exemple, les patients épileptiques nécessitant un traitement à base de CBD ne peuvent se procurer qu’un seul produit – l’Epifractan. Quatre différentes variétés de cannabis sont pourtant disponibles dans les points de vente du pays et les consommateurs à titre récréatif peuvent également cultiver leurs propres plants à domicile ou en tant que membres d’un club cannabique.

Les produits contenant au CBD sont en outre bien plus chers que le cannabis ; l’Epifractan coûte environ 200 $, alors que le gramme de cannabis ne coûte qu’environ 1 $. Pour de nombreux citoyens du pays, ce médicament n’est pas abordable.

Une étude a démontré que les deux tiers des consommateurs de CBD en Uruguay se fournissaient auprès « d’artisans producteurs » non agréés. Or, une production non réglementée est particulièrement problématique pour les individus qui s’automédicamentent.

Capsules CBD orthographiant le mot cbd

Les graines de cannabis peuvent-elles être expédiées en Uruguay ?

L’utilisation de graines de cannabis, leur achat et leur vente sont légaux. Il est légal de les planter pour en obtenir des plants ainsi que de les distribuer et de les offrir en cadeau. Cependant, le cannabis ne pouvant pas quitter le pays, il est interdit d’envoyer des graines depuis l’Uruguay vers l’étranger.

L’expédition de graines de cannabis dans le reste du pays est légale.

Le cannabis médical en Uruguay

La législation de l’Uruguay concernant le cannabis médical ressemble en de multiples points à la législation sur le cannabis récréatif. Les patients doivent se présenter à leur bureau de poste local où ils s’enregistrent auprès de l’Institution pour le contrôle et la réglementation du cannabis (IRCCA). Une fois enregistrés, ils peuvent acheter du cannabis thérapeutique en pharmacie.

Les quantités autorisées sont exactement les mêmes que pour le cannabis récréatif : 10 grammes par semaine et pas plus de 40 grammes par mois. Malheureusement, ce programme d’accès au cannabis médical n’est réservé qu’aux patients âgés de plus de 18 ans et n’offre donc aucune solution pour aider les enfants souffrant de conditions telles que l’épilepsie.

Curieusement, l’Uruguay autorise également les détenus à se soigner avec du cannabis médical, sous réserve de l’acceptation d’un médecin traitant. Le cannabis est souvent utilisé pour le traitement des prisonniers ayant développé une dépendance à la pâte de cocaïne (« paco »), un sous-produit toxique issu de la fabrication de la cocaïne.

Un homme avec des gants et un masque examinant une plante de cannabis

L’exportation du cannabis thérapeutique

Désireux de positionner l’Uruguay sur le marché international du cannabis médical, le gouvernement envisage le développement d’activités d’exportation massive.

Diego Olivera, chef du Conseil national des drogues, a déclaré que la législation de l’Uruguay sur le cannabis, caractérisée par sa transparence et ses règles fermes, donne au pays une longueur d’avance dans le domaine.

« Aujourd’hui l’Uruguay dispose d’une industrie du cannabis dynamique très difficilement comparable à d’autres secteurs », commente-t-il.

Le chanvre industriel en Uruguay

Comme le cannabis, la culture de chanvre est légale en Uruguay. Ainsi, un grand nombre de producteurs de chanvre du pays sont optimismes quant aux perspectives qui s’offrent à eux, et ce pour une raison essentielle ; si l’industrie du cannabis récréatif est réglementée par le gouvernement qui dicte aux détaillants ce qu’ils peuvent ou ne peuvent pas vendre, celle du chanvre n’est pas réglementée de la même manière, ce qui donne plus de liberté aux producteurs.

Gaston Rodriguez Lepera, actionnaire chez Simbiosys (un producteur autorisé de cannabis récréatif dans le pays), explique : « L’Uruguay a encore la possibilité de développer une industrie dans des secteurs qui ne sont pas aussi sensibles que ceux du cannabis récréatif, (comme) des initiatives socialement acceptées telles que la marihuana thérapeutique ou le chanvre industriel. »

Plante de cannabis contre le coucher de soleil à l'arrière-plan

Bon à savoir

Si vous avez l’intention de voyager en Uruguay (ou si vous y résidez), il est intéressant de savoir ce qui suit :

  • L’Uruguay a été le premier pays au monde à légaliser le cannabis récréatif. Le Canada lui a emboîté le pas, mais cinq ans plus tard.
  • Depuis la légalisation, la demande est telle que les producteurs ne peuvent pas satisfaire la demande. Diego Olivera, chef du Conseil national des drogues, commente : « La demande dépasse notre capacité de production. C’est un défi que nous devons relever. »
  • Olivera estime à environ 20 à 25 tonnes métriques la quantité de cannabis consommée en Uruguay (marchés noir et légal combinés). Des études universitaires présument que ce chiffre peut atteindre 30 tonnes – une quantité énorme pour un pays relativement petit.

L’histoire du cannabis

On ne connait pas exactement le moment auquel le cannabis a été introduit en Amérique du Sud – les historiens croient que les Espagnols l’ont introduit lors de la colonisation du continent.

Des preuves indiquent que les anciennes cultures méso-américaines utilisaient différentes plantes dans leurs rituels sacrés traditionnels, mais on ignore si ces plantes étaient liées au cannabis. On peut néanmoins supposer que le cannabis a été reconnu et apprécié pour ses propriétés psychoactives lorsqu’il a finalement fait son entrée dans le pays. En bref, il ne s’agissait probablement pas de quelque chose de nouveau pour les populations qui vivaient là.

Les Espagnols ont non seulement introduit le cannabis sur le continent, mais ils ont également développé de gigantesques plantations de chanvre dont la culture s’est poursuivie durant de nombreux siècles.

L’Uruguay est remarquable en ce qu’il n’a jamais considéré la consommation de cannabis criminelle, même lorsque la prohibition battait son plein aux États-Unis (une vague d’opposition au cannabis qui s’est répandue dans le monde entier). Qu’il ait été le premier pays à le légaliser entièrement, à des fins récréatives et médicales, semble tout à fait logique.

Attitudes à l’égard du cannabis

Bien que les lois uruguayennes en matière de cannabis soient très progressistes, l’attitude du public n’est pas aussi libérale. En fait, une enquête menée peu de temps après l’adoption de la loi a révélé que les deux tiers de la population s’opposaient à cette décision. Une autre enquête faite en 2017 a indiqué un léger glissement de l’opinion publique, avec un peu plus de la moitié des personnes interrogées qui désapprouvaient le statut légal de la drogue.

Beaucoup de personnes sont encore faussement persuadées que le cannabis est une drogue « d’initiation », qui conduit à la consommation de drogues plus dures telles que l’héroïne et la cocaïne. Elles croient également que la législation présente une menace pour la sécurité à l’intérieur du pays.

Les clubs cannabiques en Uruguay

Les clubs cannabiques du pays représentent une alternative aux points de vente au détail – ils permettent la culture collective. Les clubs doivent respecter un certain nombre de règles, notamment :

  • Avoir le statut officiel d’associations civiques
  • Indiquer « Club cannabique » dans leur nom afin de garantir une transparence totale
  • Regrouper de 15 à 45 membres, tous devant être résidents permanents du pays
  • Parallèlement aux activités de production de cannabis, faire un travail d’information et de promotion pour une consommation responsable
  • Cultiver un maximum de 99 plants (femelles)
  • Limiter à 480 grammes par personne par an la production/le stockage
  • Rapporter mensuellement à l’IRCCA les quantités de cannabis distribuées aux membres
  • Disclaimer:
    Bien que nous ayons déployé tous les efforts possibles pour assurer l’exactitude de cet article, son contenu n’est pas destiné à fournir un avis juridique ; chaque situation est différente et impose de consulter un expert et/ou un avocat.

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    L’équipe de rédaction de Sensi Seeds regroupe des botanistes, des experts médicaux et juridiques ainsi que certains des activistes les plus renommés tels Dr Lester Grinspoon, Micha Knodt, Robert Connell Clarke, Maurice Veldman, Sebastian Marincolo, James Burton et Seshata.
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  • Maurice_Veldman

    Maurice Veldman

    Maurice Veldman est membre de l’Association néerlandaise des avocats criminalistes et il est l’un des avocats en matière de cannabis les plus réputés des Pays-Bas. Avec ses connaissances du droit administratif et pénal acquises au cours de 25 années d’expérience, il défend les vendeurs de cannabis et les producteurs de chanvre en faisant valoir les inégalités entre les individus et l’Etat
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