Le cannabis au Portugal – lois, usages et histoire

The Portugese flag and a cannabis plant in front of a sunset

Les lois portugaises relatives au cannabis sont parmi les plus progressistes au monde. En 2001, le gouvernement a décriminalisé l’usage personnel et décidé de se concentrer sur les traitements et non les sanctions. Cette approche a permis de réduire le nombre de consommateurs. Pourtant, la légalisation du cannabis médical n’est survenue qu’en 2018.

    • Capitale
    • Lisboa (Lisbon)
    • Habitants
    • 10,048,000
    • Produits CBD
    • Légal
    • Cannabis récréatif
    • Décriminalisée
    • Cannabis médicinal
    • Légal since 2018

Lois portugaises sur le cannabis

Peut-on posséder et consommer du cannabis au Portugal ?

En 2001, le gouvernement portugais a adopté la loi 30/2000 qui a décriminalisé la consommation et la possession de toutes les drogues (et du cannabis) à des fins personnelles, ce qui, à l’époque, a été perçu comme une mesure avant-gardiste décisive. Le Portugal devenait l’un des premiers pays au monde à adopter une telle position.

La loi a été adoptée pour tenter de résoudre un problème rampant de toxicomanie dans le pays. Selon une étude réalisée en 1997, la population plaçait les problèmes liés aux drogues au premier rang des problèmes sociaux au Portugal. En 2009, ce chiffre avait chuté en 13e place.

Joao Goulao, le coordinateur national du Portugal pour la lutte antidrogue, a largement contribué à faire avancer les changements.

Dans une interview avec le San Francisco Chronicle, il a comparé la décision avec le refus de porter la ceinture de sécurité. « Le gouvernement exige que vous en portiez une pour votre sécurité, mais il ne vous enverra pas en prison si vous ne le faites pas, il vous donnera plutôt une amende, ou vous enverra prendre un cours de conduite. »

Il a également reconnu que « la décriminalisation n’est pas la solution à tout, mais que tout est beaucoup plus facile lorsque la dépendance est considérée comme une maladie tout aussi digne que d’autres maladies. »

De nos jours, les gens arrêtés pour possession ou consommation de petites quantités de drogue à des fins personnelles doivent se soumettre à une évaluation de la Commission locale de dissuasion des toxicomanies qui est effectuée par trois fonctionnaires – le premier un expert juridique, les deux autres, soit des professionnels de la santé, des psychologues, des travailleurs sociaux ou des sociologues. Le but est de déterminer si un traitement est nécessaire pour lutter contre la dépendance.

La loi définit une « petite quantité à usage personnel » comme une quantité ne dépassant pas celle équivalente à dix jours de consommation individuelle.

Une plante de cannabis avec des feuilles violettes

Peut-on vendre du cannabis au Portugal ?

La clémence du Portugal à l’égard de l’usage de drogues ne s’applique pas à la vente ou à l’approvisionnement. Le trafic de cannabis, classé dans la « liste I des substances », peut entraîner des peines de prison allant de un à cinq ans. Selon la gravité du crime, les peines peuvent aller jusqu’à quatre à douze ans.

S’il s’avère que le contrevenant vend de la drogue pour financer sa propre dépendance, la peine est généralement réduite. C’est également le cas si le crime est considéré comme un « trafic d’importance mineure ».

Peut-on cultiver le cannabis au Portugal ?

Lors de ses débats sur les modifications apportées en 2001 aux politiques en matière de drogue, le gouvernement portugais avait envisagé de décriminaliser la culture du cannabis à des fins personnelles. Après réflexion, le gouvernement a décidé d’exclure spécifiquement la culture de la loi de décriminalisation.

En janvier 2018, deux partis politiques (Bloc de gauche et PAN) ont présenté un projet de loi au parlement. Ce projet ne préconisait pas seulement l’utilisation du cannabis médical avec une ordonnance, mais il suggérait également de légaliser la culture du cannabis à des fins médicales, à condition que la teneur en THC soit minime.

Cet aspect du projet de loi n’a pas été adopté et, à ce jour, la culture du cannabis demeure illégale. La vente d’outils et d’équipements de culture est également interdite, bien que la production et la vente de produits à base de chanvre industriel soient légales avec une licence.

Le CBD est-il légal au Portugal ?

Le CBD est légal à des fins médicales. Il peut également être acheté et consommé sans ordonnance, tant que la teneur en THC (la substance responsable du high) est inférieure à 0,2 %.

La formule chimique de la CBD et une plante de cannabis

Les graines de cannabis peuvent-elles être expédiées au Portugal ?

Compte tenu de l’indulgence de la législation portugaise à l’égard de la consommation personnelle, sa position plus sévère face aux graines de cannabis est surprenante. Actuellement, la loi stipule qu’il est illégal de posséder, d’acheter ou de vendre des graines de cannabis sans licence industrielle.

Le cannabis médical au Portugal

L’usage de cannabis à des fins médicales a été approuvé par le gouvernement portugais en juin 2018. Le projet de loi précisait que tous les médicaments devaient être prescrits par un médecin, et seulement dans le cas où tous les autres traitements conventionnels ne fonctionnent pas. Le cannabis médical peut être prescrit pour les symptômes associés à la douleur chronique, les traitements du cancer et les troubles de stress post-traumatique, entre autres.

L’organisation gouvernementale Infarmed doit délivrer une licence pour tous les médicaments. Infarmed est une division du ministère portugais de la Santé chargée de réglementer, contrôler et évaluer les médicaments et les produits de santé afin de protéger la santé publique. En 2017, elle a autorisé la construction d’une installation de culture de cannabis médical au Portugal. Les récoltes contiendront des niveaux élevés de THC et seront destinées à l’exportation.

La loi de 2018 stipule également que le gouvernement doit soutenir la recherche scientifique sur le cannabis et sur ses bienfaits thérapeutiques potentiels.

Bourgeons de cannabis dans un conteneur en plastique orange

Le chanvre industriel au Portugal

La production de chanvre industriel est légale au Portugal, à condition que les plantes ne contiennent pas plus de 0,2 % de THC. Pour cultiver du chanvre légalement, les entreprises doivent demander un permis au ministère portugais de l’Agriculture. La production est lourdement réglementée et les cultivateurs doivent se soumettre à des inspections pendant toute l’année.

Le ministère de l’Intérieur estime que 14,2 hectares de chanvre ont été cultivés entre 2015 et 2018. Cependant, certains producteurs de chanvre ont exprimé leur inquiétude pour l’avenir suite à l’annonce des lois sur le cannabis médical de 2018. Les risques de conflits entre le chanvre (contenant peu de THC) et le cannabis de qualité médicale (plus puissant) ont conduit le gouvernement à suspendre la culture du chanvre au début de 2019.

Au sujet de la situation, l’avocat et conseiller en matière de chanvre Humberto Nogueira a déclaré à HempToday que « les fermiers et les investisseurs ne peuvent faire de planifications précises pour la saison 2019 » et que les fermiers sont contraints à « regarder leurs fleurs pourrir dans le champ ». D’autres rumeurs concernant l’introduction de lois visant à limiter l’utilisation du chanvre aux fibres ne font qu’aggraver les inquiétudes.

Un champ de plantes de chanvre et un ciel bleu

Les partis politiques portugais et le cannabis

En 2018, le pays a concrétisé son attitude envers le cannabis lorsque le Parlement portugais a massivement voté en faveur de la légalisation du cannabis à des fins médicales. Un seul parti s’est abstenu de voter, celui de centre droit, le CDS-PP.

Lors de récents débats parlementaires sur la légalisation du cannabis récréatif, le Parti socialiste (PS) a qualifié l’initiative d’ « évolution naturelle ». La députée Jamila Madeira a souligné qu’il importait d’adopter des « principes de précaution et d’être prudent » et « d’évaluer certains points critiques du contrôle de la consommation ».

Bon à savoir

Si vous voyagez au Portugal ou que vous y résidez, il est pertinent de savoir ce qui suit : 

Histoire du cannabis

Le Portugal a jadis été une puissance mondiale. Naturellement, il a été en contact avec le cannabis lors de ses explorations à l’étranger. Les Portugais de l’époque coloniale en ont probablement découvert en Inde, au Mozambique et en Angola – des pays qui ont été sous contrôle portugais pendant de nombreuses années.

On pense même que les Portugais auraient importé le cannabis au Brésil au 16e siècle – soit d’eux-mêmes, soit par les esclaves qu’ils transportaient à l’époque. Il est donc raisonnable de conclure que les commerçants portugais ont rapporté du haschich et du cannabis dans leur pays pendant plusieurs centaines d’années.

Historiquement, les Portugais sont également d’illustres cultivateurs de chanvre. La population l’utilise depuis des siècles pour créer des cordages et des voiles, ce qui a peut-être contribué à leur réputation de grands marins.

Attitude à l’égard du cannabis

À la fin du 20e siècle, on considérait largement d’un mauvais œil toute forme de consommation de drogue (y compris la consommation de cannabis), ce qui n’est pas surprenant compte tenu du problème rampant de toxicomanie des années 80 et 90.

De nos jours, les termes utilisés pour désigner les consommateurs de drogues ont considérablement changé. Les gens qui choisissent de consommer des substances telles que le cannabis ne sont désormais plus appelés « drogados » (junkies), mais simplement des « personnes qui consomment de la drogue ».

Comment la politique portugaise en matière de drogue a-t-elle été élaborée ?

En 1998, la Commission pour une stratégie nationale antidrogue (CNDS) a publié un rapport dans lequel elle recommandait une série de réformes pour la politique nationale de lutte contre la drogue. Dans son rapport, elle suggérait de se concentrer moins sur la criminalisation des toxicomanes et davantage sur la réduction des méfaits et l’amélioration des traitements.

Le rapport a également souligné les problèmes liés à l’incarcération – particulièrement en ce qu’ils exercent une pression accrue sur l’économie du pays – ainsi que le haut taux de récidivisme qui rendait l’incarcération une option moins efficace que la réadaptation.

Fait inhabituel, le Conseil des ministres a approuvé le rapport dans sa quasi-totalité. La stratégie nationale antidrogue a suivi à la lettre tous ses principes.

La politique progressiste du Portugal fonctionne-t-elle ?

Dans les années 80, le Portugal a connu une situation de crise : une personne sur 10 utilisait de l’héroïne. Il faut savoir que le pays a été isolé du reste du monde jusque dans les années 1970. Ayant manqué l’expérimentation et la liberté des années 60, sa population n’était pas préparée lorsque la drogue a commencé à inonder le pays.

Deux décennies plus tard, le gouvernement a pris la décision audacieuse de décriminaliser l’usage personnel de drogues, délaissant ainsi l’aspect punitif pour mettre de l’avant le traitement. Suite à cette décision, le nombre de consommateurs de drogues (et de cannabis) a diminué.

D’autres facteurs sont évidemment aussi en cause, mais il est juste de dire que la politique du Portugal a été efficace.

Clubs sociaux cannabiques portugais

Les clubs sociaux cannabiques se retrouvent partout dans le monde, y compris au Portugal. Les clubs sont gérés par leurs membres, et la culture ne se fait que pour l’usage des membres, qui, en grande partie, consomment à des fins médicales.

Leurs activités sont techniquement illégales, car la loi ne permet pas la culture de plantes de cannabis. Considérant le succès d’entreprises similaires en Espagne, certains politiciens ont toutefois suggéré de légaliser ces clubs.

En 2013, le parti politique Bloc de gauche a soumis au Parlement une proposition suggérant d’autoriser les clubs sociaux à cultiver le cannabis. Cette proposition n’a pas été acceptée.

Le cannabis sera-t-il légalisé dans le futur ?

La législation portugaise en matière de drogue reflète déjà la position libérale du pays face à la consommation de cannabis. L’usage personnel est décriminalisé, et il est possible qu’il devienne complètement légal. Le cannabis médical a depuis été introduit et, bien qu’il n’existe actuellement qu’un seul produit sur le marché (Sativex), cela pourrait changer à l’avenir.

En effet, le Portugal peut tirer parti de sa production nationale de cannabis. Le climat, semblable à celui de la Californie, est idéal pour les plantes, et la culture de cannabis à grande échelle pourrait propulser l’économie nationale.

  • Disclaimer:
    Bien que nous ayons déployé tous les efforts possibles pour assurer l’exactitude de cet article, son contenu n’est pas destiné à fournir un avis juridique ; chaque situation est différente et impose de consulter un expert et/ou un avocat.

Comments

9 réflexions sur “Le cannabis au Portugal – lois, usages et histoire”

  1. Merci à Sensi seeds pour toutes ces infos. Félicitations pour la mise à jour de votre site plus moderne et plus agreable. Vous êtes désormais prêts pour participer à ce qui s’annonce comme une force économique massive selon un expert en cannabis américain.

  2. J’ai passé 5 jours à Lisbonne en voyage de noce et nous avons été étonné d’etre souvent « interpellé  » par des revendeur de drogue alors que la police Portuguaise est présente dans beaucoup de rue. Cependant aucune agressivité de la part de ces revendeurs.

    1. Pas étonnant que la police laisse faire: ce que les revendeurs de « drogue » vendent uniquement aux touristes et aux gogos de tous poils n’est rien d’autre que du laurier pressé qu’ils font passer pour du shit!!!
      Or, il faut le savoir, la vente et la consommation du laurier n’est aucunement illégale au Portugal!
      Faut juste pas se faire prendre des vessies pour des lanternes

      1. Voir l’article à ce sujet (en portugais, aisément traduisible avec Google pour les non-lusophones): observador.pt/2015/05/25/droga-vendida-na-baixa-lisboa-na-verdade-louro-prensado/

  3. gold account

    La loi française interdit la production, la détention, la vente et l’usage de stupéfiants, avec des sanctions plus ou moins sévères selon l’acte ; à titre d’exemple, le simple usage peut conduire à une peine allant jusqu’à un an d’emprisonnement pouvant s’accompagner ou être substituée par une amende allant jusqu’à 3 750 euros ; le trafic, lui, pouvant conduire à la réclusion criminelle à perpétuité et 7 500 000 euros d’amende. L’auto-production de cannabis est, en France, considérée comme telle dès lors que l’on possède ou que l’on s’occupe régulièrement d’une plante, mâle ou femelle. La sanction maximale encourue est une peine d’emprisonnement pouvant atteindre 3 ans et jusqu’à 50 000 euros d’amende.

    1. Merci du rappel, cela met bien en perspective les divergences d’opinions et leurs résultats en matière d’utilisation de cannabis. La France représente le plus gros consommateur de cannabis en Europe malgré un arsenal répressif aux antipodes du Portugal qui considère les utilisateurs comme des membres de la société qui ont besoin d’aide plutôt que d’être réprimé et ont un taux de consommation en dessous de la moyenne Européenne.

      Cependant il serait préférable de préciser vos sources concernant la peine maximal de production pour usage personnel, car jusqu’à présent la loi ne fait pas de différence entre chaque produit et puni jusqu’à vingt ans de réclusion criminelle et 7 500 000 euros d’amende la production ou fabrication illicite de stupéfiants.

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Auteur et réviseur

  • Profile-image

    Sensi Seeds

    L’équipe de rédaction de Sensi Seeds regroupe des botanistes, des experts médicaux et juridiques ainsi que certains des activistes les plus renommés tels Dr Lester Grinspoon, Micha Knodt, Robert Connell Clarke, Maurice Veldman, Sebastian Marincolo, James Burton et Seshata.
    En savoir plus
  • Maurice_Veldman

    Maurice Veldman

    Maurice Veldman est membre de l’Association néerlandaise des avocats criminalistes et il est l’un des avocats en matière de cannabis les plus réputés des Pays-Bas. Avec ses connaissances du droit administratif et pénal acquises au cours de 25 années d’expérience, il défend les vendeurs de cannabis et les producteurs de chanvre en faisant valoir les inégalités entre les individus et l’Etat
    En savoir plus
Retour haut de page