Le commerce du hasch implique actuellement que les producteurs du tiers monde se font souvent exploiter. Les producteurs et le personnel traitant le hasch ne reçoivent qu’une maigre part des bénéfices de l’industrie. Comment développer un hasch équitable ou est-ce un rêve lointain dans l’avenir lorsque la législation mondiale se sera réalisée ?
Et si on avait un système de commerce équitable pour la production et vente de hasch et marihuana ?
Depuis des siècles les paysans afghans et indiens cultivent du cannabis pour la production de hasch. Pour certains villages dans ces deux pays, cette cultivation représente la principale source de revenus. Les paysans reçoivent entre €70 et €180 tandis que le consommateur débourse jusqu’à €14.000 euro pour le même produit.
Plus de 90% de l’argent qui circule dans le commerce du hasch, finit entre les mains de centaines d’intermédiaires qui organisent le transport du hasch provenant des fermes de l’Afghanistan et de l’Inde vers les consommateurs, les dealers de drogue clandestins et les coffee-shops et clubs sociaux dans le monde entier.
Les paysans, leur famille et autres travailleurs mal rémunérés sont responsables pour la totalité du processus de la production de hasch : cultiver le cannabis lors de toute la saison de croissance, faire la moisson, faire sécher les plantes et récolter la résine.
Presser la résine brute pour obtenir du hasch se fait parfois par le paysan lui-même et parfois ce sont des communautés locales qui s’en occupent. A ce moment-là le hasch est prêt à être consommer. Pourtant une importante part du prix payé par le consommateur va vers les organisations qui s’occupent du transport du hasch vers le point de vente final.
L’effet secondaire du marché de la drogue illégale qu’on observe est que les paysans par le monde sont forcés à cultiver des denrées très précieuses et illégales et ceci même au détriment de la culture d’aliments nutritifs pour eux-mêmes et leur famille. La majeure part de la culture de cannabis en Orient (Inde et Afghanistan) se fait dans des circonstances illégales et dont presque la totalité est transportée vers l’Europe et l’Amérique ayant comme but d’y être vendue légalement à un prix bien supérieur. Ainsi le hasch maroquin ou Malana Cream finissent dans des coffee-shops à Amsterdam.
En l’absence d’un marché de hasch internationalement reconnu et légalisé, l’exploitation des paysans en Afghanistan et au Maroc est devenue plutôt la règle que l’exception. La raison est que les paysans vivent dans des pays en voie de développement où ils cultivent ces denrées à haute valeur pour compléter leurs revenus. Ces denrées de haute valeur sont souvent illégales. Pensez à l’opium et au coke. La majeure part de cette richesse provenant de la culture de ces plantes se retrouve finalement entre les mains des guerriers locaux, de la criminalité organisée et même des politiciens corrompus.
Pour citer un exemple provenant d’un rapport de l’ONU de 2010, le revenu net par hectare de cannabis en Afghanistan était estimé à peu près à $3300 ou €2970. L’ONU estime dans le même rapport que la production de résine de cannabis (hasch) peut atteindre environ 145 kg par hectare. En 2007 on a calculé qu’un kilo de hasch aux Pays-Bas représente une valeur de marché de près de €1900. Etant donné que la production par hectare peut atteindre 145 kg de hasch en Afghanistan, ceci équivaut à une valeur brute de plus de €275.000 aux Pays-Bas. Ceci signifie qu’à peine 1% du total des revenus est destiné aux paysans.
Le cannabis herbe ou aussi simplement connu sous la dénomination cannabis of marihuana ne pose pas un tellement grand problème lorsqu’il s’agit du commerce à échelle internationale parce qu’il n’est que rarement transporté au niveau international. Dans la plupart des pays le cannabis se cultive donc localement. Néanmoins il existe de grands soucis concernant les droits et les salaires des travailleurs dans les pays légaux. Par exemple en Amérique il existe de gros soucis concernant les droits et circonstances de travail des trimmers et il existe également des problèmes avec les travailleurs saisonniers qui travaillent illégalement dans les fermes de cannabis.
Leur donner un prix équitable pour le hasch permettrait aux paysans de générer des revenus leur permettant de vivre convenablement pour la culture de cannabis sur une partie plus réduite de leur terre et en même temps ils pourraient cultiver d’autres aliments sur leur terre pour eux-mêmes et la communauté. Ceci paraît peut-être trop idéaliste car pour un véritable système de commerce équitable il faut que tous les processus de cultivation, de production et de transport soient légaux. On peut justement discuter du fait qu’une des grandes contributions au processus illégale est justement le transport global du hasch qui est illégal et risqué.
Les rouages actuels du marché du hasch
La majeure partie de hasch dans le monde provient de l’Afghanistan, du Maroc et de l’Inde. Le prix varie d’endroit en endroit mais en général on suppose que les prix de hasch sont les plus élevés au Maroc. Comme déjà mentionné les paysans en Afghanistan ne reçoivent qu’entre €70 – €180 pour un kilogramme tandis qu’au Maroc un kilogramme vaut facilement €1500.
La proximité du marché européen joue ici un grand rôle puisqu’une courte traversée en bateau sépare le Maroc du sud de l’Espagne. Ceci en comparaison avec les 5000 kms qui séparent l’Afghanistan de l’Europe. C’est pourquoi les coûts pour apporter le produit jusqu’au consommateur final sont bien plus élevés. L’Inde à son tour se trouve à presque 6000 km éloigné de l’Europe, ce qui fait que les frais et les risques pour faire passer les produits en Europe sont encore plus élevés. Ceci influence le prix que les vendeurs veulent débourser dans le pays d’origine du hasch.
Pourquoi faut-il un système de commerce équitable ?
Ce sont surtout les fermiers maroquins qui produisent à grande échelle, qui peuvent se permettre de créer des exploitations qui soutiennent les cultures de variétés modernes. Les fermiers traditionnels n’ayant pas ces moyens, et ils représentent encore toujours la majorité, reçoivent cependant des rémunérations basses pour leurs produits et vivent ainsi en pauvreté et n’ont que des droits réduits.
Le hasch afghan est en général considéré de qualité inférieure au hasch maroquin, ce qui déclare qu’on paie pour ce produit globalement des prix plus bas tout au long du processus du producteur au distributeur. En général pour du hasch maroquin on paie directement au producteur un prix de €250 jusqu’à €1500 par kilogramme, tandis que pour le hasch afghan comme déjà mentionné plus haut les prix pour le producteur varient entre €70 et €180.
Pour un kilogramme de hasch afghan on paie chez le grossiste à Amsterdam entre €750 et €2500, tandis que le prix pour un kilogramme de hasch maroquin atteint €1000 pour du hasch de qualité inférieure et jusqu’à €6000 pour le hasch de la meilleure qualité. En enfin dans les coffee-shops on paie pour le hasch d’origine afghane entre €2,50 et €10 par gramme, tandis que les variantes marocaines se ventent pour un gramme entre €4 et €16.
Le salaire moyen en Afghanistan est ainsi considérablement plus bas qu’au Maroc. En Afghanistan le salaire annuel moyen varie autours des €8000 par an, tandis que ce chiffre au Maroc se trouve près des €20.000. Il faut donc tenir compte de tous ces facteurs lorsqu’on définit ce qu’est un salaire équitable ou injuste dans chaque pays.
D’autre part on ne peut nier que la majeure part des bénéfices générés au sein des deux marchés sont réquisitionnés par des organisations criminelles qui prennent à charge le transport du hasch vers l’Europe. Bien sûr tout n’est pas la faute aux transporteurs du hasch même. La loi est après tout un facteur fort influent qui crée de telles situations car les transporteurs courent de haut risque d’être incarcérés et pour cela ils demandent des prix élevés pour l’organisation du transport.
Certes, il existe une base pour changer la législation internationale qui pourrait régulariser le marché et qui pourrait ainsi mettre en place des situations commerciales équitables entre les importateurs et les exportateurs.
Actuellement, existe-t-il déjà un certain commerce équitable pour le hasch ?
En un mot, non. Avant de pouvoir faire labellisé un produit comme équitable dans le sens légale du mot, il faut d’abord le certifier et le faire approuver par le Fairtrade Foundation et son organisation de certification, FLOCERT. Ceci est évidemment exclu pour un produit qui est selon la législation internationale illégal et qui ne peut être importé ou exporté de façon légale.
Sur le marché noir, les producteurs de hasch ne reçoivent que de maigres revenus comparés aux bénéfices empochés par les intermédiaires, grossistes et distributeurs. Néanmoins, il existe toutefois une ou deux citations sur un phénomène tel que le « Fair Trade » qui pourrait être pris en considération sur le marché illégal.
En 2015 VICE faisait des déclarations sur un groupe de distributeurs connus sous le nom de The Scurvy Crew qui vendaient des produits sur le marché illégal, The Silk Road, du deep web. Ce marché s’est toutefois fermé en 2013. The Scurvy Crew souscrivait des contrats d’exclusivité avec les fermiers qui recevaient “un bonus d’inscription” pour améliorer leurs propres circonstances de vie et celles de leur famille. Le chef du Crew déclarait que la plupart des fermes étaient entièrement tombées en ruine. Le groupe avait été si loin que dans un cas il avait payé les frais médicaux d’une femme des fermiers et qu’ils avaient également financé la rénovation de la ferme.
Est-il possible de créer un système de commerce équitable pour le hasch ?
Aussi longtemps que le marché international du cannabis et du hasch restent dans l’illégalité, il est impossible de créer un véritable système de commerce équitable garantissant une meilleure répartition des bénéfices. Il est toutefois possible que nous allions rencontrer de plus en plus de telles conventions du genre The Scurvy Crew étant donné que ces systèmes peuvent apporter d’importants avantages pour aussi bien le producteur que le distributeur. Pour citer un exemple sortant de l’article de VICE, il mentionnait que l’éthique du groupe se portait garant pour l’existence d’une relation professionnelle vraiment fantastique entre les producteurs ce qui engendrait également une livraison stable de hasch de haute qualité aux clients.
D’autre part il est important de tenir compte du fait que si le cannabis passerait vraiment dans la légalité, son prix sur le marché libre diminuerait considérablement après un certain temps pour ainsi se retrouver à un niveau comparable à d’autres denrées légales telles que le raisin (un exemple représentatif car la production de raisin est également destinée à créer un produit à hautes taxes qui peut engendrer une éventuelle intoxication et pour lequel on demande un prix élevé par hectare comparé à d’autres denrées légales).
Les cultures illégales par hectare sont plus précieuses que les cultures légales précisément à cause du fait qu’elles se trouvent dans un contexte illégal. Ces denrées illégales valent davantage car la culture, la manipulation et la distribution entraînent précisément de hauts risques.
Selon les données de ONU, la valeur du cannabis par kilomètre carré atteint près de $45 millions de dollar. Ceci comparé aux raisins qui vaut $625.000 par km², tandis que des tomates valent $1,415 million par km². Le raisin et les tomates font partie des cultures les plus lucratives au monde et quand-même la valeur du cannabis est exponentiellement bien plus élevée. Si la valeur du cannabis baissait jusqu’à des valeurs inférieures et comparables par km², même le plus honnête système de commerce équitable ne serait pas capable de générer des revenus comparables que si le cannabis restait dans l’illégalité.
Ce qui rend le problème en question en partie encore plus compliqué est qu’alors que la législation trouve sa voie en Amérique, au Canada, en Europe et même en Australie, cette tendance ne se répand pas vers les plus importants producteurs de hasch au monde : en Inde, en Afghanistan et au Maroc. Même si les revendeurs en Amérique ou en Europe auraient l’intention de faire partie d’une convention de commerce équitable, sa réalisation serait quasi impossible étant donné le fait que le cannabis reste illégal dans le pays d’origine.
Le commerce équitable est-il souhaitable ?
Parvenir à une réglementation équitable est moins nécessaire et souhaitable que le commerce équitable pour hasch. Ceci est dû au fait qu’en général on transporte bien moins de cannabis au niveau international puisque dans les pays où il a un statut légal, on y trouve des cultures et des programmes de croissance mis en place localement. Dans les pays où le cannabis est illégal, on l’utilise pour produire du hasch (qu’on exporte) ou qu’on vend localement sur le marché noir.
La seule importation/exportation de cannabis à grande échelle qui a eu lieu lors des dernières décennies est celle du chanvre. Pour le Farm Bill de 2018 il était illégal de cultiver de la chanvre en Amérique. C’est la raison pourquoi la plus grande partie du chanvre était importée d’Europe. La plupart des pays en Europe sont considérés comme développés, où le risque d’exploitation des fermiers est bien plus bas.
En théorie, le commerce équitable ne peut être appliqué sans la présence d’un marché libre. Les deux parties doivent bénéficier de pouvoir pour déterminer leurs conventions en toute liberté car ceci est la base d’un marché honnête. Cela étant dit, il est pratiquement impossible de créer un tel paramètre dans un climat général où le cannabis est illégal. L’élément d’illégalité ouvre grandes ouvertes les portes à l’exploitation et à la création d’un entourage parfait où des relations de pouvoir supérieur-inférieur se développent entre fermiers et vendeurs.
La commission consultative gouvernementale aux Pays-Bas a déjà abordé ce problème auparavant. Le gouvernement néerlandais apporte son soutien au commerce équitable et ceci même en relation avec la vente de cannabis dans le propre pays. Alors qu’il reconnaît effectivement le problème, ils déclarent qu’en même temps il est exclu de discuter de l’importation de cannabis en provenance de l’étranger puisqu’au niveau international et européen il existe de maints obstacles légaux en comparaison avec la production et la distribution de cannabis.
Si la légalisation devenait un phénomène global, il serait nécessaire d’imposer des structures qui attribueraient aux pays en voie de développement le même droit pour participer à cette industrie. Et ne pas seulement en vue de recevoir les mêmes bénéfices mais aussi pour ainsi améliorer la santé publique et les circonstances de vie en rendant la production du chanvre et du cannabis médicinal à nouveau accessible.
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